La corrélation entre la tabagie et le cancer du sein est avérée grâce aux nombreuses études menées depuis des décennies. Toutefois, il est fréquent que les patientes ne soient pas au fait de deux éléments cruciaux pour leur santé : le tabagisme passif s’avère aussi nocif que l’actif et il n’est jamais trop tard pour arrêter de fumer, même lorsque la maladie est déclarée.
L’effet de la nicotine sur les cellules
Les cancérologues affirment que le tabac reste un facteur de risque avéré du cancer du sein.
La nicotine favorise la prolifération des cellules cancéreuses et provoque l’angiogenèse. Ce processus dans lequel les vaisseaux sanguins vont « alimenter » la tumeur en nutriments et en oxygène, ce qui va accélérer sa croissance.
D’autre part, la circulation de la nicotine dans l’organisme inhibe l’apoptose permettant la mort programmée des cellules défectueuses, comme celles de la tumeur. Ainsi, la prolifération des cellules cancéreuses dans le sein est encouragée, mais aussi dans les tissus des organes adjacents, engendrant un risque accru de métastases.
Angiogenèse et apoptose combinées contribuent au développement de la tumeur cancéreuse et augmentent le risque de cancer généralisé.
La nicotine n’est pas la seule en cause
Outre la nicotine dont la nocivité n’est plus à prouver, les autres produits chimiques contenus dans le tabac et émis lors de sa combustion sont tout aussi délétères pour notre organisme. Or, la cigarette recèle plus de 7 000 produits chimiques, tous plus cancérogènes les uns que les autres.
Tabagisme actif ou passif, un danger pour les femmes
Le tabagisme actif est un facteur aggravant pour le développement du cancer du sein. Le risque est proportionnellement inverse à l’âge auquel la patiente a commencé à fumer : plus elle était jeune, plus les probabilités de développer une tumeur maligne augmentent.
Par ailleurs, une étude de l’INSERM à l’échelle européenne précise que le tabagisme passif s’avère aussi délétère que le tabagisme actif. Cette exposition est encore plus nocive lorsqu’elle survient avant une première grossesse.
Un panel de 500 000 femmes
L’étude de l’INSERM a porté sur un panel de 500 000 femmes, alors en bonne santé, sélectionnées en 1992, dans dix pays européens. Les chercheurs les ont interrogées sur leur rapport au tabac en prenant en compte les facteurs suivants :
- usage du tabac passé ;
- usage du tabac présent ;
- âge d’initiation au tabac ;
- durée du tabagisme ;
- quantités consommées ;
- exposition passive familiale ;
- exposition passive professionnelle.
Ils ont ensuite retenu 332 000 femmes pour l’étude, parmi lesquelles ils ont enregistré le développement d’un cancer du sein pour 9 800 d’entre elles.
La preuve du risque dû au tabagisme passif prouvé
Les chercheurs affirment que les patientes qui fument s’exposent à un sur-risque de cancer du sein de 16 %. Si le chiffre paraît modéré, il est loin d’être négligeable si l’on tient compte des 60 000 cancers déclarés chaque année en France.
L’étude a également montré que le sur-risque en cas de tabagisme passif était de 10 %, là encore, un chiffre éloquent, car ces femmes auraient pu être protégées par leur entourage.
Le facteur aggravant de la jeunesse
Enfin, l’étude a aussi permis de confirmer ce que les chercheurs pressentaient déjà : commencer à fumer jeune, avant une première grossesse, favorise l’apparition d’un cancer du sein plus tard dans la vie.
Commencer à fumer entre 16 et 26 ans accroît le risque de 22 % de développer la maladie. Après 26 ans, le sur-risque devient nul. Toutefois, commencer à fumer à cet âge – comme à n’importe quel âge – est nocif, car le tabac affecte tous les organes, dont bien sûr les poumons, les voies respiratoires et la bouche en priorité.
Il n’est jamais trop tard pour arrêter de fumer
Fumer depuis longtemps constitue un facteur aggravant pour la santé d’une patiente atteinte d’un cancer du sein. Toutefois, il n’est jamais trop tard pour arrêter de fumer, même une fois la tumeur déclarée. Les bénéfices sont avérés, y compris en prenant en compte une thérapie de remplacement de la nicotine concomitante.
Les diverses études menées ont apporté la preuve que le taux de survie chez les femmes ayant cessé de fumer est largement supérieur à celles qui conservent cette mauvaise habitude. Les chercheurs ont établi le chiffre spectaculaire de 33 % correspondant à la diminution du risque de décès pour les patientes ayant arrêté de fumer, qu’elles soient atteintes d’un cancer du sein, d’un cancer respiratoire ou de maladies cardiovasculaires.
Il est important de préciser qu’il demeure toujours bénéfique d’arrêter le tabac, quel que soit votre âge ou l’avancée de votre maladie. Il est bien sûr préférable de prendre de bonnes résolutions avant qu’une tumeur ne soit détectée, car là encore, les chiffres sont spectaculaires : une femme de moins de 30 ans peut espérer égaler l’espérance de vie d’une femme qui n’a jamais consommé de tabac. A contrario, plus vous attendez, plus les séquelles du tabagisme deviennent importantes.
Article écrit en collaboration avec le Docteur Eric Sebban, Chirurgien gynécologue et cancérologue spécialiste du cancer du sein.